Présentation de l’éditeur :
Cet ouvrage réunit l’intégralité des poèmes des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire illustrés par cent quatre-vingt-cinq œuvres peintes, dessinées, lithographiées, aquarellées, essentiellement de la seconde moitié du XIXe siècle. Il révèle les correspondances multiples qui existent entre l’œuvre phare que constituent Les Fleurs du Mal et la peinture du XIXe siècle finissant. Cette complicité des arts souligne autant les préoccupations baudelairiennes que celles d’artistes non moins visionnaires : la volonté d’exprimer par des images fortes les aspirations et les désillusions d’une génération dont la sensibilité s’exacerbe à la recherche de la vérité.
L’auteur (1821 - 1867) :
Héritier du romantisme et fidèle à la prosodie traditionnelle, il exprime à la fois le tragique de la destinée humaine et une vision de l’univers, où il découvre de secrètes « correspondances ». Après les Fleurs du mal (1857), qui lui valurent une condamnation pour immoralité, son oeuvre critique (Curiosités esthétiques, l’Art romantique, 1868) et ses Petits Poèmes en prose (1869) sont à la source de la réflexion sur la modernité.
Avant-propos de Diane de Selliers :
Car j’ai de chaque chose extrait la quintessence,
Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or.
Charles Baudelaire
Tels sont les derniers vers de Charles Baudelaire pour son projet d’épilogue à la deuxième édition des Fleurs du Mal en 1861. Six des cent poèmes de la première édition ont été censurés en 1857, il en compose alors trente-cinq nouveaux, dont ceux des Tableaux parisiens, de Révolte et de La Mort. Fasciné par la Beauté, il tente de manière éperdue de l’atteindre et, dans des élans mystiques, l’exprime par des vers sublimes. Il la cherche jusque dans son désespoir le plus profond :
Si le ciel et la mer sont noirs comme de l’encre,
Nos cœurs que tu connais sont remplis de rayons ! [1]
À ses détracteurs, il af firme vouloir extraire la beauté du mal afin d’explorer des champs poétiques nouveaux.
Il livre ainsi une œuvre d’une très grande unité, architecturée avec un soin infini aussi bien dans la construction des vers que dans l’agencement des poèmes. Héritier du Romantisme, Charles Baudelaire va le dépasser, libérer les pouvoirs intérieurs de sa conscience, exprimer les méandres de l’âme, transgresser les tabous et créer une poésie où rêve, mélancolie, solitude, détresse, révolte, dépravation, péché, néant vont côtoyer les rives de l’amour et effleurer le ciel. La poésie moderne est née, la voie est ouverte pour la génération nouvelle, celle des symbolistes. Les Fleurs du Mal, ses allégories, ses métaphores, ses images qui nourrissent l’émotion et exaltent les sensations sont accueillies avec ferveur. Poètes et artistes de toute l’Europe s’en emparent.
Théâtres d’hallucinations et de fantasmes tantôt cruels, tantôt désespérés, symptomatiques de hantises surgies sous forme de fulgurances presque démentes, les œuvres décadentes et symbolistes émanent d’une nécessité proprement intérieure des artistes, portés par une dynamique idéaliste. Fascination pour le beau et obsession de la mort s’unissent en des visions spectrales, sensuelles et alanguies, où s’insinuent l’étrange et le mystérieux.
Nous avons choisi cent quatre-vingt cinq œuvres peintes, dessinées, lithographiées, aquarellées afin d’établir les correspondances multiples qui existent entre l’œuvre phare que constitue Les Fleurs du Mal et la peinture du XIXe siècle finissant. Cette complicité des arts révèle autant les préoccupations baudelairiennes que celles d’artistes non moins visionnaires : la volonté d’exprimer par des images fortes les aspirations et les désillusions d’une génération dont la sensibilité s’exacerbe à la recherche de la vérité.
Dans sa préface, Jean-David Jumeau-Lafond, arrière-petit-fils du peintre Carlos Schwabe auquel il consacre son travail d’historien d’art et, à travers lui, ses études sur le symbolisme, met en évidence l’influence de l’univers baudelairien sur ces artistes qui rejettent le matérialisme de cette société bourgeoise de la fin du XIXe siècle, industrielle et dirigiste : « En ouvrant la porte à une création autonome et libre, porteuse de tous les rêves et de tous les cauchemars de l’âme, le poète avait soulevé le couvercle de la boîte de Pandore et ce sont les visions les plus inimaginables qui s’en étaient échappées prenant les couleurs infinies et les formes multiples de la pulsion créatrice. »
Cet ouvrage est accompagné d’une chronologie détaillée qui met l’accent sur la vie de l’écrivain et les grands moments politiques, culturels et artistiques de son époque.
Enfin, une biographie succincte des quatre-vingt-cinq artistes choisis pour cette édition contribue à une meilleure appréhension des liens multiples et des réflexions communes qui se créent entre ces personnalités farouchement individualistes, traversant l’Europe pour se retrouver à Paris où s’épanouissent les créations picturales et poétiques les plus novatrices.
Loin d’adhérer à l’aphorisme de Félicien Rops, ami intime de Baudelaire et artiste résolument moderne : « Plus la femme a d’importance dans une civilisation, plus la décadence est grande », laissons-nous transporter par un texte précurseur et une esthétique subversive, qui s’adonnent à une « Danse macabre » [2] magistralement orchestrée, miroir d’un siècle en tourment.
Éditions Diane de Selliers, parution en mars 2007
ISBN : 978-2-903656-35-5
472 pages / 19,5cm x 26cm / 50 euros
Bibliographie complémentaire :
— Les Fleurs du mal (Préface de Jacques Perrin), Pocket 2007... à 1,50€ ;
— PIERRAT Emmanuel, 100 livres censurés, Chêne, 2010 :
« Après Madame Bovary, le recueil de Baudelaire est le second trophée à venir orner le tableau de chasse constitué par l’inénarrable Pierre Ernest Pinard, procureur impérial de Louis Napoléon Bonaparte, au cours de l’année 1857. Année faste ! Puisqu’après s’être payé Flaubert et Baudelaire, l’insatiable procureur s’en prend à Eugène Sue - le malheureux en mourra.
Baudelaire remet son manuscrit à l’éditeur Poulet-Malassis en février 1857, le 25 juin. Un premier tirage de 1 100 exemplaires est mis en vente, et le 5 juillet, Gustave Bourdin, critique littéraire du Figaro, dénonce un livre "ouvert à toutes les démences de l’esprit, à toutes les putridités du coeur : encore si c’était pour les guérir, mais elles sont incurables" [...] Le 15 juillet 1857, les exemplaires sont saisis. L’auteur et son éditeur sont condamnés à des amendes de 300 et 100 francs, et six poèmes sont bannis du recueil pendant près d’un siècle. » (page 30-31)
— SLAMA Marie-Gabrielle, Étude sur les Fleurs du Mal (2° édition), Ellipses Marketing, 2005 ;